lundi 14 juin 2010

Masculinité, féminité, ... félicité?

Je tombe parfois sur des articles qui affirment que les femmes d'aujourd'hui ne sont pas aussi heureuses qu’elles ne l’étaient il y a 20, 30 ou 40 ans, tandis que les hommes ont tendance à dire qu’ils sont plus heureux. Les plus misogynes affirment que le féminisme a mal servi aux femmes en leur faisant croire qu'elles pouvaient tout avoir. Certains disent même qu’il est ironique de voir que le féminisme a été plus bénéfique pour les hommes que pour les femmes.

Aucun des articles ne définit le concept d’être heureux. À bien y penser, je ne suis pas certain de pouvoir offrir moi-même une définition véritablement objective. Pour simplifier les choses, je vais adopter une maxime bouddhiste : « On ne peut pas être joyeux dans toutes les circonstances, mais il est possible d’être content. » C’est sans doute une question de satisfaction. Si l’on parvient à satisfaire à nos besoins, il est possible d’être content. Plus que cela, et l’on risque d’être heureux et peut-être même d’éprouver de la joie. Est-ce clair?

Mais même le contentement est une question de perception. Et c’est peut-être ce qui nous mettra sur la bonne piste dans cette réflexion : Comment mesure-t-on le bonheur en 2010 par rapport à 1970 ou 1980?

Le mouvement féministe n’était encore que presqu’à ses débuts dans les années 1960 et au début des années 1970. Les familles où les femmes devaient travailler à l'extérieur étaient relativement peu nombreuses. On disait que les hommes faisaient vivre la famille tandis que la femme gagnait de l'argent de poche. Un homme avait besoin d'une carrière, tandis qu’une femme pouvait se contenter d'un emploi. Les femmes vraiment ambitieuses devaient sacrifier la famille et se joindre à un ordre religieux ou constamment justifier leur décision de ne pas se marier et de ne pas fonder de famille. Voilà donc les attentes de l’époque.

Les choses ont évolué depuis. En 2010, les femmes peuvent effectivement avoir des carrières et les ménages à deux revenus sont maintenant la norme, et souvent par nécessité. Certaines réussissent à élever une famille tout au long de leur carrière, tandis que d'autres le font par étapes : carrière d’abord, famille ensuite. Parfois, c’est la méthode sandwich : quelques années de carrière, quelques années à élever des enfants de bas âge, puis le retour à la carrière. D’autres encore décident de ne pas avoir d’enfants puisque c’est mieux pour l'environnement et c’est devenu choix de vie légitime.

Les hommes ont toujours cherché un travail rémunéré par obligation. Il n'a jamais été question de savoir si une carrière pouvait être satisfaisante ou non. Certains ont eu des carrières satisfaisantes, mais c’était toujours un moyen pour arriver à une fin : mettre de la nourriture sur la table et voir à ce que leurs familles aient un abri. Pour les femmes, cependant, la carrière était une fin en soi. C’était une façon d’entrer dans un monde qui était autrefois réservé aux hommes.

Je me demande parfois si notre « éthique du travail » a influencé le féminisme d'une manière inattendue, surtout en Amérique du Nord. Certes, rien n’est gratuit sur cette terre. Mais doit-on être ravi de mettre nos efforts et notre énergie au service d’un patron qui risque d’être abusif à notre égard? Est-ce que travailler 60 heures par semaine pour 40 heures de rémunération est une façon de s’épanouir? En revanche, c’est qui la personne qui disait qu’être son propre patron était un véritable signe de réussite? Comme si on n’en avait pas assez des règlements du gouvernement, il y a toute la question des clients qui refusent de payer.

Je ne veux pas décourager les femmes qui aspirent à une carrière, et je ne veux pas non plus avoir l’air d’appuyer les antiféministes, mais je crois que ces derniers ont peut-être raison de dire que l’on a fait croire aux jeunes filles, à tort, que l’épanouissement personnel dépendait d’une carrière. À la base, pour demeurer vivant, il faut manger. Nous pouvons chasser, pêcher ou cueillir notre nourriture, nous pouvons élever des troupeaux, cultiver des potagers ou obtenir la nourriture par le troc ou par l'achat. Peu importe nos réalisations à titre d’espèce humaine, ce fait de base n'a pas changé. Presque tout ce que nous faisons au travail, et parfois à l’extérieur des heures de travail, vise l’obtention de la nourriture, d’un abri ou de médecine.

Je n'ai rien contre l’épanouissement personnel, mais je n’essaie plus de me réaliser grâce au travail. Il y a des aspects de mon travail que j’aime bien, d’autres non. Je ne m’attends pas à ce que mon boulot seulement me permette de me réaliser puisque mon épanouissement ne dépend que de moi.

Par contre, je vise toujours la possibilité d’être heureux. C'est une question de perception, mais parfois, mon travail me rend content. Je peux penser à bien boulots pour lesquels ce ne serait pas le cas. Mais rien ne m’oblige d’y penser pour l’instant. Et cette pensée me rend effectivement heureux!

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