jeudi 30 décembre 2010

Au nom de la liberté

Médecin : Comment avez-vous pu supprimer les pulsions sexuelles? Des drogues? Des lois punitives?

Premier ministre : Au début, un peu des deux. Maintenant, après 300 ans, nous trouvons le concept même de la reproduction sexuée plutôt répugnant.

De l'épisode « Up The Long Ladder », Star Trek, The Next Generation.

Une de nos amies les plus chères a récemment trouvé la religion. Le mormonisme, pour être plus exact. Alors qu'elle était encore assez favorable au concept de l'évolution des espèces, elle a trouvé un moyen d'intégrer Adam et Ève dans sa cosmologie et a également constaté une plus grande compréhension spirituelle depuis qu'elle a cessé, dit-elle, de « se toucher les parties intimes ».

Lorsque sexe et religion s’entrechoquent, de nombreux problèmes surgissent en raison de la honte et du secret qui entoure trop souvent la sexualité. Si je plaide souvent pour une plus grande liberté sexuelle, c’est que je me souviens encore de l’enfance que j’ai vécue sous l'œil vigilant de ma mère, une enfance pendant laquelle j’ai été témoin, et parfois touché, par ces nombreux problèmes. Ma mère était une catholique d’une grande réserve et dont les connaissances religieuses venaient parfois en conflit avec sa formation médicale en tant qu'infirmière. Je ne crois pas qu’elle ait résolu ces conflits. Elle y passait outre tout simplement.

Alors, quand j'ai atteint un certain âge et étant donné que je n’avais pas de père pour m’expliquer la reproduction humaine et les pulsions sexuelles qui m’envahissaient déjà, elle essayait souvent de me faire visiter un de mes oncles afin que ce dernier m’« éduque » à cet égard. Elle a été particulièrement heureuse lorsqu’une de mes tantes a épousé un médecin, car ce dernier saurait sûrement me guider. Je crois qu’elle n’a jamais compris que j'aurais préféré que ce soit elle qui me renseigne, même s’il fallait ensuite que je fouille dans ses manuels de médecine afin de compléter cette « éducation ». En fin de compte, je n’ai eu pour enseignant que les livres.

Je devais sans doute avoir tout cela à l’esprit quand ma femme et moi avons décidé d’avoir le plus d’ouverture possible à la maison afin que nos enfants n’aient pas à subir le même sort. Nous ne prenions pas la peine de nous cacher derrière des serviettes lorsque nous quittions la douche. Je n'ai certainement pas porté de vêtements très souvent, et ma femme, plus frileuse, faisait la même chose pendant les canicules. Ce n'était pas de l'éducation sexuelle en soi, mais cela menait à des discussions intéressantes, notamment sur des aspects de la sexualité. Et les films de la série Look Who's Talking (« Allo maman, ici bébé ») y ont certainement contribué quelque chose aussi.

Nous voulions notamment faire comprendre à quel point un grand nombre de personnes – mais surtout les femmes – ont été victimes des enseignements religieux contre la sexualité, et même contre l’acte tout à fait innocent de se masturber. Pendant longtemps, les mythes concernant la masturbation (cela rend aveugle, fou ou stupide, vous perdrez votre « meilleur sang », vous risquez d'endommager les organes génitaux, etc) ont semé la honte et ont assuré un contrôle des ouailles.

Pourtant, nous savons que la masturbation est une façon utile pour mieux comprendre son propre corps et ses réactions. En outre, Planned Parenthood affirme que la masturbation aide à se détendre et à éliminer le stress et la tension physique. L'orgasme peut atténuer tout naturellement la douleur, ce qui explique pourquoi un grand nombre de femmes se masturbent afin de soulager les crampes menstruelles. Chez les hommes, l'éjaculation fréquente peut réduire le risque d’avoir un cancer de la prostate. Donc, que ce soit ou non en situation d’absence de partenaire, la masturbation reste une option à privilégier.

Qui plus est, la plupart des hommes finissent par se masturbent un jour ou l’autre. Est-ce que c’est écrit dans nos gènes? Est-ce que c’est parce que les hommes se permettent un peu plus de latitude? Je ne sais pas. Mais il est souvent dit que 90 pour cent des hommes se masturbent et les autres mentent à ce sujet. Les femmes, prises collectivement, ne se masturbent pas autant, ou du moins elles ne le reconnaissent pas aussi facilement. Les dogmes religieux décourageant la masturbation ont sans doute contribué à cette situation.

De ce que j'ai pu apprendre de notre amie nouvellement religieuse, sa religion interdit également la masturbation, et elle a accepté cet enseignement sans autre questionnement. Elle ajoute que, en évitant de penser aux choses sexuelles, elle a vécu une croissance spirituelle dans d’autres aspects de son être. Je ne contesterai pas son expérience. Je ne peux pas ressentir ce qu'elle a ressenti. Et choisir l’abstention est tout aussi légitime que de faire le contraire.

Par contre, je ne dirais jamais la même chose pour ce qui est promouvoir l’abstention. Et voilà l'essentiel du problème. Lorsqu’elle aura une fille, lui refusera-t-elle la chance de découvrir son corps? Voudra-t-elle que sa fille rejette sa nature sexuelle jusqu’au mariage? Tout cela au nom de la perfection spirituelle?

L'un des obstacles à la pleine liberté pour les femmes a été la présence d'autres femmes désireuses d'écraser ceux qui voudraient travailler pour le progrès social, et ce au nom d'une divinité ou d’un chef religieux, ou encore pour être bien vues par leurs consœurs. J'espère sincèrement que notre amie ne devienne pas une de ces femmes qui s’opposent à cette liberté.

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