lundi 18 janvier 2010

Le fil anti-Québec

Il paraît que certaines personnes qui s’opposent au protocole d’entente pour la vente d’Énergie Nouveau-Brunswick à Hydro-Québec sont anti-Québécois. Quelle surprise!

Le premier ministre du Nouveau-Brunswick a récemment présenté ses excuses à l'Assemblée législative pour avoir dit exactement cela. Or, si certaines vérités ne sont pas bonnes à dire tout haut sur la place publique, elles demeurent vraies quand même.

Un lecteur régulier m’a demandé mon opinion sur le protocole d’entente. Il m’a été difficile de prendre position car même les experts ne s’entendent pas. L’opposition au protocole d’entente comprend plusieurs camps.

Certaines personnes s’opposent à tout ce qui est proposé. Si l’on propose la vente, on s’y oppose. Si on propose de ne pas vendre, on s’y oppose aussi.

Ensuite, comme nous sommes au Nouveau-Brunswick, il y a le camp anti-francophone. On ne veut pas vendre au Québec parce que le Québec est francophone. Les gens continuent de blâmer le bilinguisme pour tous leurs malheurs et présentent l’Alberta, le royaume canadien du pétrole, comme exemple du paradis que l’on pourrait connaître si l’anglais était la langue des services publics et des affaires gouvernementales au Nouveau-Brunswick.

D’autres opposants s’opposent à la vente du service public à Hydro-Québec non pas parce que le Québec est francophone, mais parce que le Québec pourrait un jour se séparer du Canada. (Le fait que le Québec sera toujours notre voisin à moins d’un incident géologique majeur ne semble pas faire partie du raisonnement.)

D’autres craignent que parce qu’Hydro-Québec sera le fournisseur de l’électricité et propriétaire du réseau de distribution, le Nouveau-Brunswick aura abandonné sa souveraineté pour ce qui est de l’approvisionnement en électricité et surtout pour ce qui est l’établissement des tarifs. Il y a des clauses dans le protocole d’entente qui traitent de cela, mais les craintes demeurent dans l’esprit de bien des gens. En fait, s’ils sont contre l’idée de vendre le service public, ils ne s’opposent aucunement à la possibilité d’acheter de l’électricité d’Hydro-Québec.

Enfin, il y a des gens qui ne s’opposent pas à la vente d'Énergie N.-B., mais voudraient avoir de meilleures assurances pour ce qui suivra les cinq premières années de l’entente. Actuellement, nous savons que les clients résidentiels, commerciaux et de gros auront droit à un gel des tarifs pendant les cinq premières années, et ensuite toute hausse sera limitée au taux de l’inflation. Mais cela ne rassure pas les manifestants. Certains, pour des raisons de justice sociale, trouvent inacceptable que les grands clients industriels bénéficient d’une baisse des tarifs de 30 pour cent dès la première année, tandis que les autres clients commerciaux et résidentiels doivent se contenter d’un gel des tarifs pendant cinq ans.

Ceux qui appuient l’entente sont beaucoup moins divisés puisque leurs raisons pour appuyer le protocole d’entente sont généralement semblables. La production hydroélectrique est peu coûteuse et la quantité de gaz à effet de serre produite par une telle installation est peu élevée. En signant cette entente avec le Québec, les grands clients industriels auront des avantages que le Nouveau-Brunswick, à lui seul, n’aurait jamais pu offrir, ce qui permettra de maintenir et de créer bon nombre d’emplois. Quant aux autres, y compris les clients résidentiels, les tarifs actuels ne changeront pas pendant cinq ans, ce qui évite des hausses de trois pour cent pour chacune des cinq premières années.

Évidemment, tout n’est pas rose. Selon certains spécialistes, la production d’électricité au Québec est fortement subventionnée, et si on exigeait que les clients paient le prix réel de sa production, les tarifs au Québec subiraient une hausse assez importante. Il y en a que le souhaitent, d’ailleurs, puisque le Québécois moyen n’a actuellement aucun incitatif pour réduire sa consommation. Mais si les tarifs devaient un jour augmenter de façon vertigineuse au Québec, qu’est-ce que cela signifierait pour le Nouveau-Brunswick? Comme cette éventualité ne pas fait partie du protocole d’entente, il est difficile de le prévoir.

2 commentaires:

  1. Je vois que mes voisins de l’est sont aux prises avec un choix déchirant. Je constate aussi que plusieurs considérations émotives, donc qui font en sorte que le rationnel est mis de côté, font en sorte que la vision réelle de ce que représente ce projet pour la population du NB est souvent mise de côté.
    Je suis aussi surpris que le NB, qu’on nous présente souvent comme l’exemple parfait de la réussite et de la viabilité du bilinguisme au Canada n’est peut-être pas si parfait que cela! Encore là il y aura toujours des purs et durs (il y en a plusieurs au Québec) qui ne considèreront jamais autre chose que leur propre vérité pour éclairer leurs choix.
    Une chose que je ne comprend pas cependant : Pourquoi y a-t-il un sentiment anti-Québécois au NB et ce sentiment est-il exclusivement anglophone? Est-ce parce que le Québec a menacé de se séparer du Canada? Est-ce à cause du français? Est-ce parce que ces personnes préfèreraient quitter le Canada pour devenir un État américain? Est-ce à cause d’une quelconque jalousie reliée à la richesse? Personnellement je n’ai JAMAIS entendu parler qu’il pouvait y avoir un sentiment anti-Néo-brunswikois au Québec!

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  2. Bonjour François! Effectivement, l'harmonie linguistique au Nouveau-Brunswick n'est pas absolue! Mais au moins il y a des efforts à cet égard. Quant au sentiment anti-Québec ou anti-Québécois, selon le cas, c'est quand même assez rare. Ches les anglophones, la langue française y est pour que quelque chose. L'époque n'est si lointaine où l'on disait aux francophones de rentrer au Québec! (L'histoire acadienne demeure méconnue.) Quant aux francophones d'ici, il arrive que des visiteurs du Québec, qui sont maîtres chez eux, présentent une assurance qui passe pour de l'arrogance chez les Acadiens moins confiants et, peut-être, moins fortunés. D'autres diront: « Ce ne sont pas tous les Québécois qui sont comme ça. Mais les gens de Montréal, hum...! » Je crois que chez les francophones, il s'agit peut-être d'un genre d'esprit de clocher à l'échelle nationale. Les Québécois et les Acadiens qui se parlent régulièrement n'ont généralement pas ces problèmes. J'aimerais croire que ces deux peuples sont faits pour s'entendre.

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