dimanche 13 mars 2011

Sexe et naturisme, un autre regard

Le numéro de l’été 2007 d’Au naturel présente la conclusion d'un article en deux parties intitulé « Une attitude paradoxale par rapport à la sexualité » par Jacqueline Shoemaker Holmes. L'article était fondé sur la recherche qu'elle a entreprise à titre d'étudiante en maîtrise à l'Université York en 2003. Elle a choisi une plage naturiste et a passé l'été à y étudier les visiteurs et les activités.

Elle souligne que les conclusions ne s'appliquent qu'à la plage en question et aux gens qui la fréquentent, mais on voit bien par le ton de l’article qu’elle s’est permis de faire quelques généralisations sur le naturisme dans son ensemble.

Dès le premier jour, elle a attiré beaucoup d'attention, à la fois comme une femme non accompagnée et en tant que chercheure. On avait beau lui dire avant ses visites que le nudisme n'est pas sexuel en soi. Le comportement sur la plage et lors des entrevues, surtout celui du groupe dominant, a poussé la chercheure à trouver des liens entre le nudisme et la sexualité. Les deux seraient intimement liés à la sexualisation des femmes et à l'hypersexualisation des hommes homosexuels par le groupe dominant, soit des hommes d'âge moyen.

Les hommes étaient beaucoup plus nombreux que les femmes, et la plupart des femmes étaient accompagnées. Par conséquent, les réactions présentaient une perspective masculine. Les hommes parlaient beaucoup des possibilités de rencontres sexuelles même si l’on assurait qu’il s’agissait officiellement d’une plage naturiste. Il a souvent été question des attributs physiques des femmes et à quel point elles étaient désirables sexuellement, et l’on cherchait à savoir si les femmes étaient ouvertes à l’idée d’avoir des rapports sexuels. À titre de femme non accompagnée, elle a été la cible de ce que l’on pourrait qualifier d’intérêt frôlant le « dragage ». Du moins, cela se reflétait dans le comportement des hommes à son endroit.

(J’y pense : Puisqu’un endroit naturiste ne doit pas susciter des idées sexuelles, peut-être que ce lieu n'était pas tout à fait naturiste...?)

Les hommes avaient aussi des opinions arrêtées sur les gens dans une autre section de la plage – la section gaie. C’était, semble-t-il, l’endroit à visiter pour voir de l’activité sexuelle. D’après l’auteure, cela voulait dire qu’il y avait plus d’activités sexuelles dans cette partie de la plage que dans la partie « hétérosexuelle ». Après tout, elle avait entendu des anecdotes concernant ce qui pouvait se passer dans la partie dite « familiale » plus tard le soir.

Selon les recherches de l’auteure, il y a une composante sexuelle au naturisme. Les femmes non accompagnées sont perçues par les utilisateurs, en particulier les hommes hétérosexuels, comme représentant des occasions possibles de rencontres sexuelles et sont parfois invitées à passer aux actes. Quant aux gais, ils sont considérés comme étant « hypersexuels » et ne seraient pas de « vrais » naturistes.

Conclusion : il est faux de dire que le naturisme n’est « pas plus sexuel que toute autre activité ». La sexualité est cachée et, dans le cas de cette plage au moins, opprimante. En niant le rôle que joue la sexualité dans le naturisme et en refusant d’accorder une pleine égalité à ceux dont la sexualité est différente de la « norme », la possibilité de créer des alliances, avec la communauté gaie par exemple, est très faible.

Puisque nous ne pouvons pas savoir de quelle plage il s’agissait, nous ne saurons jamais si le comportement et les attitudes à cette plage constituent la règle, l'exception ou un peu des deux. En effet, l'auteur souligne qu'elle ne qualifie pas le naturisme dans son ensemble de patriarcal ou de homophobe, peut-être parce que l'échantillon est trop petit.

Que dire de nos lieux naturistes établis, stations balnéaires et autres? Sont-ils aussi « propres » que nous aimerions le croire? Est-ce que nous nous leurrerons en croyant que le naturisme ne comporte aucun élément de sexualité?

Nous avons toujours pensé au sexe sous forme d’activités sexuelles en public. Nous ne pouvons plus nous permettre de limiter ainsi nos réflexions sur la question. L'auteure ne préconise pas les activités sexuelles en public. Toutefois, elle termine en nous posant quelques questions :

• Pourquoi les pages sont-elles séparées en sections « familiale » et « gaie »; en corollaire, pourquoi certaines plages sont-elles familiales tandis que d’autres sont gaies?

• Pourquoi certains clubs excluent-ils des personnes pour motif d’orientation sexuelle?

• D’un point de vue politique et personnel, que signifie l’exclusion de la sexualité des valeurs naturistes?

• S'il y a de la place pour l'expression sexuelle dans le naturisme, où pouvons-nous la trouver? Et sinon, pourquoi pas?

• Comment le naturisme peut-il être plus inclusif et égalitaire?

Qui veut s’y risquer?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire